La longue et prolifique carrière de Sonny Rollins au saxophone ténor commence vers l'âge de 16 ans. Certaines de ses compositions comme St. Thomas, Oleo, Doxy et Airegin sont devenues des standards de jazz. Ses cinquante ans de carrière lui donnent aujourd'hui le statut de dernier géant en activité. Improvisateur, croisant les genres, poussant à leurs limites le son et le phrasé, Sonny Rollins incarne l'esprit de quête inlassable dont le jazz noir américain est marqué. Sonny Rollins est toujours en tournée en 2011, après avoir survécu à la plupart de ses contemporains avec qui il enregistra tel que John Coltrane, Miles Davis, Max Roach et Art Blakey.
Biographie
Les premières années
Bien que Sonny Rollins soit né à New York, pas très loin des temples de la musique noire new-yorkaise comme Le Savoy ou l'Apollo, ses parents sont originaires des Îles Vierges américaines. Sonny Rollins commence par jouer au piano puis passe au saxophone alto qu'il reçoit à l'âge de 8 ans, s'y exerce à la façon de Louis Jordan et choisit par la suite le saxophone ténor en 1946. Impressionné par Charlie Parker et pris sous l'aile de Thelonious Monk, le jeune Sonny Rollins fait ses classes professionnelles à l'école du Be-bop, dès la fin des années 1940. Pendant ses années d'études au lycée, il joue dans un groupe avec d'autres futures légendes du jazz, Jackie McLean et Kenny Drew. Ses premiers enregistrements pour le label Fantasy révèlent une sonorité originale et instantanément identifiable, pour partie héritée de Coleman Hawkins, une maîtrise rythmique et harmonique hors du commun et déjà un certain penchant pour la déconstruction/reconstruction du thème.Il enregistre en 1949 avec Babs Gonzales puis la même année avec J.J Johnson et Bud Powell. Dans ses enregistrements jusqu'en 1954, il a l'occasion de jouer avec des artistes tels que Miles Davis, Charlie Parker et Thelonious Monk.
En tant que saxophoniste, il est dans un premier temps attiré par les sons Jump et R&B des artistes comme Louis Jordan, puis est entraîné dans la tradition mainstream du saxophone ténor. Le journaliste musical Joachim Berendt décrit cette tradition comme assise entre les deux pôles de la forte sonorité de Coleman Hawkins et le phrasé souple et léger de Lester Young, qui a tant fait pour inspirer la vague d'improvisation du be-bop dans les années 19504. Sonny Rollins les a fait se rencontrer tel un improvisateur fluide du post-bop, avec un son fort et sonore comme personne depuis Coleman Hawkins. Il reste que l'univers musical de Charlie Parker est omni-présent dans la construction de sa musique et ne le quittera jamais complètement.
Rollins commence à se faire un nom lorsqu'en 1951 il enregistre notamment sa composition "Oleo" avec le Modern Jazz Quartet et Miles Davis. En 1953 et 1954 il travaille avec Thelonious Monk, enregistrant l'album Thelonious Monk and Sonny Rollins, qui comprend les morceaux I Wanna Be Happy et Friday the 13th. Sonny Rollins rejoint ensuite le quintet Clifford Brown-Max Roach en 1955 (les enregistrements effectués avec ce groupe sont présents sur les albums Sonny Rollins Plus 4 et Clifford Brown and Max Roach at Basin Street; Sonny joue également sur la moitié de l'album More Study in Brown), et suite à la mort de Clifford Brown en 1956 il a principalement travaillé sur ses propres albums. A cette époque, il débute sa carrière avec le label Prestige, qui a enregistré quelques-uns de ses albums les plus connus, il enregistre également dans les années 1950 pour d'autres labels dont Blue Note, Riverside et le label de Los Angeles Contemporary.
Saxophone Colossus
En mai 1956, Sonny Rollins enregistre l'album Tenor Madness. Le pianiste Red Garland, le contrebassiste Paul Chambers et le batteur Philly Joe Jones du groupe de Miles Davis, qui enregistrait également dans ce studio, participent à cet album. Le morceau qui donne le titre à l'album est le seul enregistrement de Sonny Rollins avec John Coltrane, qui lui aussi jouait dans le groupe de Miles Davis.C'est surtout l'album Saxophone Colossus enregistré un mois plus tard, le 22 juin 1956 qui est très largement acclamé. Les enregistrements se déroulent au studio de Rudy Van Gelder dans le New Jersey, avec Tommy Flanagan au piano, Doug Watkins un ancien contrebassiste du groupe Jazz Messengers et son batteur favori Max Roach. C'est le sixième album de Sonny Rollins en tant que meneur et il inclut l'une de ses plus célèbres compositions, St. Thomas, qui est un calypso caribéen basé sur une mélodie chantée par sa mère dans son enfance. L'album comprend également le titre Strode Rode, un morceau remarquable de hard bop au rythme rapide et Moritat une composition de Kurt Weill également connue sous le nom Mack the Knife.
À la fin de l'année Sonny Rollins enregistre une suite pour Blue Note avec Donald Byrd à la trompette, Wynton Kelly au piano, Gene Ramey à la contrebasse et Max Roach à la batterie un collaborateur de longue date de Sonny. Ces enregistrements sont publiés l'année suivante sur l'album Sonny Rollins Volume One.
Un trio sans piano
En 1957, il est l'un des premiers à utiliser la contrebasse et la batterie, sans piano. L'artiste raconte que cette formule n'était au départ qu'un essai dû aux absences répétées de son ou ses pianistes. Cette particularité vient à être connue sous le nom de « strolling ». Cette année-là, il a recourt au trio ténor-contrebasse-batterie sur les albums Way Out West et A Night at the Village Vanguard. Sonny Rollins se sert de ce trio par intermittence tout au long de sa carrière, en faisant parfois le choix inhabituel d'utiliser son saxophone comme un instrument en section rythmique sur des solos de contrebasse et de batterie. Way Out West est ainsi nommé car il a été enregistré pour un label basé en Californie (avec le fidèle batteur Shelly Manne) et parce que l'album contient des morceaux de musique country tels que Wagon Wheels et I'm an Old Cowhand. L'enregistrement de l'album A Night at the Village Vanguard s'effectue en deux parties, une matinée avec le contrebassiste Donald Bailey et le batteur Pete La Roca puis dans la soirée avec le contrebassiste Wilbur Ware et le batteur Elvin Jones.Dans cette période, Sonny Rollins devient célèbre pour choisir des morceaux relativement banals ou non conventionnels et de les transformer en un vecteur pour l'improvisation comme There's No Business Like Show Business sur l'abum Work Time (1955), I'm an Old Cowhand et plus tard Sweet Leilani sur l'album This Is What I Do (2000) récompensé par un Grammy. L'album Newk's Time en 1957 le fait travailler à nouveau avec un piano, cette fois-ci avec Wynton Kelly, mais l'un des titres les plus remarqués est le duo saxophone - batterie sur le standard Surrey with the Fringe on Top avec Philly Joe Jones. Cette même année, il enregistre également pour Blue Note avec de prestigieux musiciens, J.J. Johnson au trombone, Horace Silver, Thelonious Monk au piano et le batteur Art Blakey qui est publié sur l'album Sonny Rollins Volume 2.
En 1958, Sonny Rollins enregistre avec le trio saxophone, contrebasse et batterie un autre album qui fait date : Freedom Suite. Un morceau de musique qui révèle aussi une forme de protestation comme l'indique les notes de Sonny Rollins sur la pochette originale : « L'Amérique est profondément enracinée dans la culture Negro : ses expressions, son humour, sa musique. Comme ironique est le Negro, qui plus que quelqu'un d'autre peut revendiquer la culture de l'Amérique comme la sienne, est en train d'être persécuté et réprimé; le Negro qui a exemplifié les sciences humaines dans leur existence même, est récompensé par un manque d'humanité. ». Le morceau éponyme est une improvisation quasi-collective de 19 minutes, faite en grande partie d'échanges libres entre les trois musiciens. L'album n'est pas entièrement politique - la seconde face étant essentiellement constituée de standards de jazz. La version 33 tours fut peu de temps disponible dans sa forme originale puisque Riverside Records fit une nouvelle édition de cet album sous un autre nom, Shadow Waltz.
Sonny Rollins réalise fin 1958 un autre album studio nommé Sonny Rollins and the Contemporary Leaders avant de faire une pause de trois ans. C'est une session d'enregistrements pour le label Contemporary où Sonny Rollins enregistre un mélange ésotérique de musiques dont Rock-A-Bye Your Baby With A Dixie Melody avec le groupe West Coast composé du pianiste Hampton Hawes, le guitariste Barney Kessel, le contrebassiste Leroy Vinnegar et le batteur Shelly Manne.
Divers
- Le générique de l'émission Bouillon de culture de Bernard Pivot est le morceau The Night has a Thousand Eyes, sur l'album What's New? (1962) de Sonny Rollins.
- St. Thomas fait partie de la bande son du film Working girl réalisé par Mike Nichols et sorti en 1988. - Le morceau Tenor Madness est présent sur la bande son du film Le Talentueux Mr Ripley d'Anthony Minghella sorti en 1999.
- Alfie a été la musique du générique de l'émission de France-Inter consacrée au jazz dans les années 70.
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Source : Article Sonny Rollins de Wikipédia en français (auteurs).
St. Thomas
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